Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/126

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rafinée des Italiens. C’est parmi ces peuples que sont nés quelques auteurs, dont on a regardé les dangereux ouvrages comme des chef-d’œuvres. Machiavel, entre les autres, s’est distingué par ses livres de politique. Si j’étois souverain, j’ordonnerois de brûler tous ses écrits qui rendent la vertu esclave d’une prévoyance à laquelle ils apprennent à tout sacrifier. Il est ridicule pour vouloir justifier l’usage de ces livres, de soutenir que la politique est un talent absolument nécessaire aux souverains. J’ai déjà démontré, que la véritable prudence n’a point besoin de régles, qui lui apprennent le moyen de secouer le joug de la vertu & de l’honneur. Un roi peut vaincre ses ennemis par sa sagesse, sans avoir recours à la fourbe & au parjure : il peut contenir ses sujets dans le devoir, sans les réduire dans l’esclavage. Il ne faut, dit un fameux auteur nazaréen, ni art ni science, pour exercer la tyrannie. A quoi donc servent tous les livres d’une politique outrée ; sur-tout dès qu’il est des ouvrages [1] qui nous apprennent à faire par la vertu tout ce qu’on peut faire par l’artifice ?

Voilà, mon cher Isaac, quels sont

  1. Le Télémaque.