Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/153

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l’on croiroit que Belzébut est un bouffon à gages, que Satan est un petit-maître aimable, & complaisant. Voici les termes originaux d’une de ces conversations infernales. Je crois qu’ils pourront t’amuser. C’est un moine qui parle.

La sœur Bonaventure, possédée par un démon nommé Arfaxa, vint me demander de se confesser à moi, disant ne vouloir parler à d’autres : & il est à remarquer que ce diable a eu toujours envie de me parler. [1]

Tu vois, mon cher Brito, que les moines nazaréens connoissent tous les diables par noms & surnoms : que ceux-ci prennent amitié pour eux, & recherchent avec empressement le moyen de leur parler. Je t’avouerai que je me sentirois assez porté à croire que la sympathie agit effectivement entre les moines & les démons ; mais je pense que ces derniers ont bien moins de malice. Tu vas le voir par le tour que ce religieux joua à ce diable Arfaxa. Voici comment il s’explique lui-même. Je me mis à genoux devant ce démon, lui disant que mon dessein étoit de venir confondre ma superbe par

  1. Recueil véritable de ce qui s’est passé aux exorcismes de plusieurs religieuses de la ville de Louviers, par le révérend pere Gaufre, imprimé à Paris, avec permission, l’an 1643. Pages 30 & 31.