Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/258

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d’être cultivée avec soin. Epicure, chef d’une secte si opposée à celle des Stoïciens, força pourtant ces philosophes de rendre justice à son mérite, d’avouer que sa volupté étoit très-séche & très-sobre. [1]

Les plus illustres docteurs nazaréens ont eux-mêmes avoué, qu’ils étoient charmés de la sagesse & de la tempérance d’Epicure. [2] Cependant ce philosophe ne s’écorcha jamais le derriere, & ne crut point que de se le frotter dans des épines fût le moyen pour devenir vertueux.

Le ridicule du passage que je viens de te citer est encore augmenté par la ressemblance qu’il a avec celui qu’on lit dans Michel de Cervantes, & qui détermina dom Quichotte à sa premiere sortie.

Je vais te le transcrire pour que tu juge plus aisément lesquels ont été les plus extravangans, ou les errans mondains, ou les errans spirituels.

Dom Quichotte disoit que le Cid Ruy Dias avoit été fort bon chevalier, mais qu’il n’avoit pas de comparaison

  1. Nec aestimatur voluptas illa Epicuri : ita enim me hercule sentio, cum sobria & sicea sit. Seneca de vita beata, cap. XIII.
  2. Epicurum accepturum fuisse palmam in animo meo, nisi ego credidissem post mortem restare animae vitam & fructus meritorum, quod Epicurus credere noluit. Augustinus, confession. lib. II. cap. XVI.