Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/28

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bien, marquent parfaitement la situation d’un cœur changé uniquement par le respect paternel, & qu’il n’a point pour le nouveau dieu qu’il sert, cette ferme croyance que méritent ses bienfaits & ses récompenses. Quelque singulier que soit le caractère d’Alzire, il est parfaitement soutenu & rempli de pensées brillantes, que la nouveauté du sujet a fournies. Tel est cet endroit où l’auteur fait faire à Alzire un parallèle des Espagnoles & des Américaines.

Par ce grand changement dans ton ame inhumaine, Par un effort si beau, tu vas changer la mienne. Tu t’assures ma foi, mon respect, mon retour, Tous mes vœux, s’il en est qui tiennent lieu d’amour. Pardonne… Je m’égare… Eprouve mon courage. Peut-être une Espagnole eût promis davantage : Elle eût pu prodiguer les charmes de ses pleurs. Je n’ai point leurs attraits, & je n’ai point leurs mœurs. Ce cœur simple & formé des mains de la nature, En voulant t’adoucir, redouble ton injure : Mais enfin c’est à toi d’essayer désormais Sur ce cœur indompté la force des bienfaits.

Je t’avoue que j’ai trouvé cet endroit charmant. Un certain naturel sauvage qui regne dans les prières d’Alzire, & le mépris qu’elle affecte