Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/326

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qui entrent dans leur ville les jours de marché. Ce droit ne leur est point dû. Les bourgeois se récrient bien contre un impôt qui fait renchérir les denrées nécessaires à la vie. Mais les gouverneurs les laissent gronder. Il est du service du roi, que ses officiers soient bien nourris. Comment pourroient-ils sans cela suffire aux fatigues militaires ? Ils vont donc toujours leur train, & ne s’étonnent point de tous ces cris impuissans, qui sont de vains murmures demeurans sans effet. Ce n’est pas que la cour ne réprimât les vexations des commandans, si elles parvenoient jusqu’à elle : on en a vu meme quelques-uns punis sévèrement. Mais lorsqu’il faut se déclarer ouvertement contre eux, tous les bourgeois jouent le même rôle que les rats dans leur conseil, contre ce fameux chat destructeur de leur race. Ils crient tous ; & aucun d’eux ne veut attacher le grelot, lever le masque, & se plaindre le premier. C’est un hazard, lorsque la cour est instruite de la conduite de certains gouverneurs ; & les habitans sont accoutumés à ces vexations militaires.

Lorsqu’on veut vivre libre & heureux en France, il faut rester dans les provinces soumises à des gouverneurs généraux, qui sont des seigneurs incapables