Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/38

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point le crime de l’infortune : & l’assassin trouva sa sûreté dans le temple, ainsi que le meurtrier involontaire. Les moines nazaréens retinrent cette maxime dans les pays où ils eurent une entière domination : ils accordèrent ainsi à leurs églises & à leurs monastères, les mêmes privilèges qu’aux palais des souverains & des ambassadeurs. Mais les droits qu’ils s’attribuerent sont devenus nuisibles à la société civile, par l’usage qu’ils en ont fait. Tous les plus grands crimes ont trouvé un azyle chez eux, au lieu que les princes qui peuvent accorder des immunités, ne protégent que des personnes dont les fautes sont pardonnables, & n’ont rien de contraire au caractère de l’honnête-homme. Un ambassadeur n’eût point certainement donné de retraite à Cartouche ; & il n’en est aucun au contraire qui ne l’eût fait arrêter. Mais ce voleur insigne eût trouvé en Italie une entière sûreté, malgré ses crimes, dans la plus petite chapelle. Hé ! quoi, mon cher Monceca, la divinité veut-elle que ses autels autorisent les crimes ? N’est-il pas absurde de ne bâtir des temples au Tout-puissant que pour fournir des retraites & des azyles aux scélérats ? Combien cruelle n’est point la superstition qui, sous