Page:Bréal - Essai de Sémantique.djvu/324

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
308
L’HISTOIRE DES MOTS.

une autre, frappent les yeux à première vue ; mais les observations dont s’occupe le sémantiste se dérobent un peu plus au regard. C’est surtout quand il faut noter l’impression faite par les mots sur l’esprit que se multiplient les chances d’erreur ; elles sont presque inévitables en maniant une langue étrangère. Un écrivain allemand qui a touché à ces matières s’en va répétant de livre en livre que le mot français ami est loin d’avoir l’accent de sincérité ni la profondeur de l’allemand Freund. Prévention naïve, mais facile à comprendre ! Il y a quelques années, un autre savant avait trouvé dans le français merci quelque chose de blessant et de bas : il pensait au latin mercedem. Ces sortes d’illusions montrent le danger ; elles prouvent que le terrain le plus familier est aussi le meilleur pour ce genre de recherche. Quand les lignes générales de la sémantique auront été tracées, on n’aura pas de peine à vérifier sur les autres idiomes les observations prises sur la langue maternelle. Les divisions générales une fois établies, on y fera entrer les faits de même ordre recueillis un peu partout.


Pénétrons donc, sans plus tarder, sur le domaine de la sémantique, et voyons quelques-unes des causes qui régissent ce monde de la parole.