Page:Braddon - Henry Dunbar, 1869, tome I.djvu/218

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
214
HENRY DUNBAR

Voudra-t-il octroyer à sir Philip l’inestimable bonheur de lui accorder cette main chérie ?

— Et sans doute… volontiers… pourvu… bien entendu, que Laura y consente. Dans ce cas, la décision de Laura est suprême. Loin de moi l’idée de contrarier les affections de ma fille, surtout lorsqu’elles tombent sur une personne qui en est digne. Je veux qu’elle épouse qui lui plaît, à la condition que cet heureux mortel soit honnête homme.

Dunbar poussa un soupir en disant ces paroles ; mais cela lui arrivait fréquemment, et il s’excusa en rappelant qu’il souffrait d’une maladie de foie contractée dans l’Inde.

— Je verrai avec plaisir Laura se marier, — dit-il, — et je serai heureux quand elle possèdera la protection d’un bon époux.

Sir Philip se leva transporté de joie. Il eût volontiers saisi la main du banquier pour lui exprimer sa gratitude par une étreinte chaleureuse, mais Dunbar le congédia d’un geste impératif.

— Au revoir, sir Philip, — dit-il. — Je ne suis pas un bien agréable compagnon, et je vous demanderai la permission de me plonger dans le Times. Vous autres, jeunes gens, vous n’appréciez pas le Times. Il vous faut des journaux remplis du récit des luttes de boxeurs, des régates, et des derniers cancans débités au Tattersall. Je crois que vous trouverez Mlle Dunbar dans le salon bleu. Parlez-lui aussitôt qu’il vous plaira, et faites-moi savoir le résultat de votre entrevue.

Il n’arrive pas souvent que l’héritière d’un million sterling soit aussi facilement accordée. Sir Philip avait des ailes en quittant les appartements du banquier.

— Qui eût jamais pensé qu’il était si brave homme ? — pensait-il. — Je m’attendais à une grande froideur, et au lieu de cela, il m’envoie tout droit près de l’objet