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HENRY DUNBAR

pour moi, — dit-il à l’aubergiste en s’asseyant à la table du déjeuner dans le petit salon, deux jours après son entrevue avec Dunbar. — Si vous connaissiez dans le voisinage quelque jolie petite maisonnette qui pût convenir à un vieux garçon solitaire ayant un beau revenu et personne pour l’aider à le dépenser, je crois que je me déciderais réellement à la meubler.

L’aubergiste se gratta la tête et réfléchit quelques moments. Puis il frappa sur sa cuisse avec force, et d’un air de triomphe :

— Je connais justement ce qu’il vous faut, monsieur Vernon, — dit-il (le Major avait pris le nom de Vernon, ainsi qu’il avait été convenu entre le banquier et lui) ; — c’est justement votre affaire, — répéta l’aubergiste, — on dirait que cela a été fait pour vous. Il y aura une vente jeudi prochain. M. Grogson, le commissaire-priseur de Shorncliffe, vendra, à onze heures précises, l’ameublement et le bail de la plus jolie petite maison qu’on puisse trouver par ici ; elle se nomme Woodbine Cottage ; c’est une jolie petite habitation qui appartenait au vieil amiral Manders. L’amiral est mort dans la maison, et comme il était célibataire et que sa fortune revient à des parents éloignés, l’ameublement et le bail du cottage seront mis aux enchères. Mais je présume, — ajouta l’aubergiste gravement en jetant un regard de doute sur son hôte, — je présume que le bail, l’ameublement, les tableaux et l’argenterie monteront à huit cents ou à mille livres, et peut-être ne vous souciez-vous pas d’y mettre tant que cela.

L’aubergiste ne put s’empêcher de jeter un regard oblique sur le drap luisant et blanchi qui couvrait les genoux pointus de son commensal assis en face de lui.

— Vous pourriez ne pas vous soucier d’y mettre tant que cela, — répéta-t-il en attirant à lui un morceau de jambon froid pesant trois quarts de livre.