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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

— Hum ! — murmura l’Anglo-Indien tirant sa moustache grise de l’air de quelqu’un qui réfléchit. — Voyons ! que vous faudrait-il pour vous satisfaire, mon cher Wilmot ?

— Je vous laisse le soin de décider.

— Très-bien, alors. Je suppose que vous seriez tout à fait content si je vous constituais une petite rente, qui vous permettrait de n’avoir rien à démêler avec le monde d’ici à la fin de vos jours. Cinquante livres par an, par exemple.

— Cinquante livres par an ! — répéta Wilmot.

Il avait tout à fait dominé son émotion violente en ce moment et il parlait avec beaucoup de calme.

— Cinquante livres par an ! une livre par semaine.

— Oui.

— J’accepte votre offre, monsieur Dunbar. Une livre par semaine, cela me permettra de vivre, de vivre comme vivent les paysans dans quelque hutte, et m’assurera du pain jusqu’à ma mort. J’ai une fille, une très-belle fille, à peu près du même âge que la vôtre ; elle partagera ce revenu avec moi, et elle aura pour bénir votre générosité les mêmes motifs que moi.

— C’est donc convenu ? — demanda l’Anglo-Indien languissamment.

— Oui, c’est convenu. Vous avez des domaines dans le comté de Warwick et dans le comté d’York, une maison dans Portland Place et un demi-million en espèces, mais évidemment, tout cela vous est nécessaire à vous. J’aurai… grâce à votre générosité et à titre d’expiation pour la honte, la misère, le besoin, le danger et l’infamie qui ont été mon partage pendant trente-cinq ans… une livre par semaine assurée pour le restant de mes jours. Mille fois merci, monsieur Dunbar. Je vois que vous êtes toujours l’homme d’autrefois, le même maître que j’aimais étant jeune, et j’accepte votre offre généreuse.

Il éclata de rire quand il eut fini de parler. Son rire