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LE SECRET

qu’il soit, qui puisse m’étonner. Pour moi, vous n’êtes plus la femme coupable à laquelle il peut rester un cœur pour souffrir, vous êtes l’incarnation du mal ; vous ne souillerez pas plus longtemps cette maison de votre présence. À moins que vous ne confessiez qui vous êtes et ce que vous avez été en présence de l’homme que vous avez trompé si longtemps, et que vous n’acceptiez la pitié que nous pouvons juger convenable de vous témoigner, je vais réunir les témoins qui constateront votre identité, et, au risque d’attirer la honte sur ceux que j’aime, vous serez punie de vos crimes. »

Milady se releva tout à coup, et se dressa devant lui d’un air résolu ; elle avait rejeté ses cheveux en arrière et ses yeux étincelaient.

« Faites venir sir Michaël, s’écria-t-elle, faites-le venir, et je confesserai tout, oui, tout ! Peu m’importe ! J’ai lutté assez longtemps contre vous et déployé assez de patience : mais vous êtes vainqueur, monsieur Robert Audley ! C’est un beau triomphe, n’est-ce pas ? une grande victoire ! Vous avez employé votre esprit froid, lumineux et calculateur à un noble projet ! Vous avez vaincu une folle !

— Une folle ! s’écria M. Audley.

— Oui, une folle ! Quand vous dites que j’ai tué George Talboys, vous ne dites que la vérité, et quand vous dites que je l’ai traîtreusement assassiné, vous mentez ! je l’ai tué parce que je suis folle ; parce que mon intelligence penche un peu plus du côté de la folie que de la raison ; parce que, lorsque George Talboys m’accabla de reproches et me menaça comme vous l’avez fait, mon esprit, qui n’a jamais été bien sain, perdit toute sa raison, et je devins folle. Faites venir sir Michaël, et au plus vite ; s’il doit savoir quelque chose, qu’il sache tout, qu’il apprenne en entier le secret de ma vie ! »