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DE LADY AUDLEY

« Vous avez bon cœur, Robert, dit-elle, et j’ai eu tort de m’emporter contre vous parce que… »

La jeune fille s’arrêta tout à coup.

« Parce que quoi, ma chère cousine ? demanda M. Audley.

— Parce que je suis une niaise, Robert, dit promptement Alicia ; mais n’importe, je ferai ce que vous voudrez et ce ne sera pas ma faute si mon père n’oublie pas ses chagrins avant peu. J’irais au bout du monde avec lui si je pensais que le voyage lui fît plaisir. Je vais tout préparer. Pensez-vous qu’il parte ce soir ?

— Oui, je ne crois pas qu’il veuille rester une nuit de plus sous ce toit.

— Le train part à neuf heures vingt, dit Alicia ; nous quitterons donc la maison dans une heure si nous voulons le prendre. Je vous reverrai avant notre départ, Robert.

— Oui, Alicia. »

Miss Audley courut vers sa chambre et appela sa servante pour l’aider à faire les préparatifs de ce voyage dont elle ne connaissait pas la destination finale.

Elle se dévouait corps et âme à la tâche que lui avait confiée Robert. Elle aida la servante à garnir les porte-manteaux et la fit sourire en mettant ses robes de soie dans des cartons à chapeau et ses souliers en satin dans son nécessaire de toilette. Elle mit la maison sens dessus dessous pour trouver tout ce qu’il lui fallait, et à la voir entasser ainsi ses cahiers de musique, ses broderies, ses parfums, on aurait supposé qu’elle allait s’embarquer pour quelque île sauvage où les ressources du monde civilisé étaient inconnues. Elle pensait au chagrin inconnu de son père et peut-être quelque peu à la figure sérieuse et à la voix grave de son cousin Robert, qui s’était montré à elle sous un nouveau jour.