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LE SECRET

— Au diable Phœbé ! qui vous parle d’elle ? s’écria Marks. Qu’est-elle pour qu’on s’en occupe ? Vous rappelez-vous que j’amenai après dix heures un monsieur tout mouillé et couvert de boue ? Il avait le bras cassé et l’épaule presque démise ; il fallut couper ses habits pour les lui enlever, et il s’assit au coin du feu où il regardait les charbons d’un air stupide sans savoir où il était et chez qui il était. Vous souvenez-vous que je le lavai comme un enfant, que je l’essuyai et que je fus obligé de lui faire avaler de l’eau-de-vie avec une cuillère que je glissai entre ses dents ? »

La vieille femme fit signe de la tête que oui, et murmura quelque chose pour prouver que tous ces détails lui revenaient, maintenant que son fils les avait rappelés.

Robert Audley poussa un cri terrible et tomba à genoux à côté du lit du mourant.

« Ô mon Dieu !… s’écria-t-il, merci de ta bonté !… merci d’avoir sauvé la vie de George Talboys !…

— Attendez, dit Marks, n’allez pas si vite. Mère, donnez-moi cette cassette qui est sur la commode. »

La vieille obéit ; et, après avoir fouillé au milieu des tasses à thé, des boîtes sans couvercle et des faïences qui encombraient la commode, elle en retira une cassette d’un aspect assez malpropre et dont le couvercle glissait sous la pression de la main.

Robert était toujours agenouillé auprès du lit, la figure cachée dans ses mains. Luke ouvrit la cassette.

« Il n’y a pas d’argent, dit-il, et c’est dommage, car celui qu’il y a eu est parti depuis longtemps ; mais cette cassette renferme quelque chose qui vaut peut-être plus que de l’argent, et ce quelque chose je vais vous le donner, monsieur, pour vous prouver qu’une brute comme moi a de la reconnaissance pour ceux qui lui témoignent de la bonté. »