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LE SECRET

« Mon devoir est tout tracé, songeait-il, quoique pénible… il n’en est pas moins clair, il me conduit fatalement à porter la ruine et la désolation chez ceux que j’aime. Il faut que je commence par l’autre bout… oui, il faut que je découvre l’histoire d’Helen Talboys depuis le départ de George jusqu’au jour des funérailles dans le cimetière de Ventnor. »

M. Audley monta dans une voiture qui passait et se fit reconduire chez lui.

Il arriva à Fig-Tree Court assez à temps pour écrire quelques lignes à miss Talboys et mettre sa lettre à la poste de Saint-Martin-le-Grand avant qu’il fût six heures.

« Ce sera un jour de gagné, » se dit-il en se rendant à la Direction générale des Postes avec cette courte lettre.

Il avait écrit à Clara Talboys pour lui demander le nom du petit port de mer où George avait rencontré le capitaine Maldon et sa fille ; car, malgré l’intimité qui existait entre George Talboys et Robert, ce dernier savait à peine quelques détails insignifiants sur la vie qu’avait menée son ami depuis son mariage.

Depuis le moment où George Talboys avait lu dans le Times la nouvelle de la mort de sa femme, il avait évité toute allusion à l’histoire de son mariage, qui s’était terminée si brusquement, et à des souvenirs qui s’effaçaient devant une si terrible réalité.

Cette courte histoire renfermait trop de souffrances. George devait se reprocher sans cesse cet abandon qui avait dû paraître si cruel à celle qui attendait ! Robert Audley avait surpris cela, et le silence de son ami ne l’avait pas étonné. Ils avaient tous deux évité ce sujet et Robert ignorait aussi complètement l’histoire de cette malheureuse année, dans la vie de son camarade de collège, que s’ils n’eussent jamais vécu en amis dans sa retraite du Temple.