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LE SECRET

La porte s’ouvrit pendant qu’il songeait à sa femme bien-aimée, et en levant la tête, le baronnet aperçut sa forme gracieuse debout sur le seuil.

« Comment, ma charmante ! vous arrivez seulement ? s’écria-t-il pendant que sa femme fermait la porte derrière elle et s’avançait vers son fauteuil. Je songe à vous et je vous attends depuis une heure. Où avez-vous été et qu’avez-vous fait ? »

Milady, debout dans l’ombre de l’appartement, s’arrêta quelques instants avant de répondre à ces questions.

« J’ai été à Chelmsford, dit-elle, faire des emplettes, et… »

Elle hésita, — roulant les rubans de son chapeau entre ses doigts blancs et délicats d’un air d’embarras tout à fait ravissant.

« Et qu’avez-vous fait, ma chère, depuis votre arrivée de Chelmsford ? J’ai entendu une voiture s’arrêter à la porte il y a une heure ; n’était-ce pas la vôtre ?

— Oui, je suis revenue il y a une heure, répondit-elle, toujours avec le même air d’embarras.

— Et comment avez-vous employé votre temps depuis votre retour ? »

Sir Michaël Audley adressa cette question avec un ton légèrement empreint de reproche. La présence de sa jeune femme était le soleil de sa vie, et quoiqu’il ne voulût pas l’enchaîner à ses côtés, il souffrait à l’idée qu’elle pouvait passer son temps loin de lui à quelque occupation frivole.

« Qu’avez-vous fait depuis votre retour ici ? répéta-t-il ; qui vous a retenue si longtemps loin de moi ?

— J’ai causé avec… avec… M. Robert Audley. »

Elle roulait et déroulait toujours entre ses doigts les rubans de son chapeau, et sa pose embarrassée n’avait pas changé.

« Robert ! s’écria le baronnet, Robert est-il ici ?