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LES OISEAUX DE PROIE

nait à cette classe d’hommes par lesquels sont défendus les remparts fameux de la respectabilité anglaise.

Sheldon avait renoncé à ses expériences, à ses travaux ; depuis longtemps il avait cédé tous les accessoires de son art à un jeune aspirant dentiste, avec sa respectable maison, sa clientèle, et son mobilier. C’est ainsi que la carrière de Sheldon, comme chirurgien-dentiste, s’était terminée. Un an après le décès d’Halliday, sa veuve inconsolable avait accordé sa main à son ancien amoureux, non qu’elle eût oublié son premier mari ou qu’elle se montrât ingrate envers sa mémoire, mais simplement parce qu’elle n’avait pu trouver aucune bonne raison à opposer aux demandes réitérées et pressantes de Sheldon.

« Je vous avais bien dit qu’elle n’oserait pas vous refuser, » avait dit George lorsque le dentiste revint de Barlingford où Georgy demeurait avec sa mère.

Philippe avait d’abord répondu d’une manière ambiguë aux questions de son frère, mais il avait fini par avouer qu’il avait demandé en mariage Mme Halliday, et que sa demande avait été favorablement accueillie.

« Cette manière d’apprécier la chose n’est pas très-flatteuse pour moi, dit-il en se redressant avec une sorte de dignité. Depuis longtemps Georgy et moi éprouvions de l’attachement l’un pour l’autre, et il n’y a rien d’étonnant si…

— Si vous vous mariez maintenant, que Tom n’est plus. Pauvre vieux Tom !… lui et moi nous étions de si bons camarades. J’ai toujours eu dans l’idée que ni vous, ni l’autre médecin, n’aviez bien compris sa fièvre lente. Vous avez fait de votre mieux, bien certainement ; mais je crois cependant qu’en cherchant bien, on aurait pu trouver moyen de l’en tirer. Ce n’est pas, du reste,