Page:Brassard - Les Mémoires d'un soldat inconnu.pdf/123

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
117
les mémoires d’un soldat inconnu

rir sur l’épiderme le frisson d’épouvante qui glace les membres, dilate les yeux, frappe le cerveau et rend fou. On l’entend ricaner quand la soif nous dévore et que la gangrène se joue dans les plaies. Il nous poursuit quand la peur talonne. On le voit dans les hallucinations de la fièvre. Il s’appuie sur notre sommeil agité et nous happe au réveil. La guerre finie, il subsistera par l’empreinte qu’il inflige à ceux qu’il touche. Longtemps après que les armes seront déposées, il faudra se battre contre son fantôme. Est-ce en prévision de cette lutte que l’on nous moule dans une tenue martiale ?

***

Nous sommes dans la désolation. Zip vient d’être blessé dans un petit engagement de rien du tout, un jeu d’enfant qui, commencé depuis le matin, nous empêche de prendre notre dîner à l’heure réglementaire des touristes. Pauvre Zip ! Nous le mettons à l’abri dans un