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— Vous !… vous… vous avez fait cela !… Pourquoi ne pas avoir tué ce bébé innocent… votre crime eût été pardonnable… Que vous avait donc fait ce petit enfant !

— Lui, rien. Oh, mais il devait payer pour toi que je hais de toutes mes forces… Ton fils, maintenant un homme perdu, doit se demander le pourquoi de sa misère… Toi, Étienne Bordier, tu sais aujourd’hui la cause de ta nouvelle souffrance. Elle s’abat sur toi et te torture à mon goût… Je m’étais juré de me venger de vous deux… Les événements m’ont bien servi… Ta vue me réjouit en ce moment… Je m’en régale… Je suis repu, gorgé, satisfait de ton désespoir.

— Démon… où as-tu mis mon fils ?…

— Cherche !… cherche !… cherche !… Ma vengeance assouvie me saoule… Je me sens devenir un être nouveau, étrange, qui fera peur. J’ai du feu dans les veines… Je sens mes forces se décupler… Ma tête bourdonne… Ah !

Étienne Bordier, effrayant à voir, s’avança sur Joachim Bruteau comme un justicier.

Il se passa alors une chose si terrible, que la Mélanie Bêlon restée pétrifiée près des deux hommes, s’enfuit en criant, à la vue du spectacle qui s’offrait.

Le visage diaboliquement épanoui du bourreau copia soudain les traits convulsés de sa victime. De la gorge du vieux Bruteau, où l’air passait en sifflant, sortit un cri rauque qui dégénéra en un long cri inextinguible dont l’écho se répercuta dans la maison, et l’emplit d’une lamentation semblable au hurlement d’un chien.