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cacher à celui qui l’avait fait éclore, et Gilles, le clairvoyant, ne devra pas s’en douter. En songeant à l’humiliation qui l’écraserait si Paul un jour venait à découvrir qu’elle l’aimait, Alix fit appel à son orgueil pour lui éviter cet affront. Il arriva en se faisant prier mais la fierté de la jeune femme bondit et arriva à la rescousse. Non, elle, Alix de Busques, ne deviendra pas la risée de Paul Bordier. Personne ne connaîtra le secret de son cœur, et pour commencer, elle devait aveugler son frère.

Un peu désemparée dans ce combat qu’elle commençait, et dont elle ignorait les embûches, Alix, aux remarques de son frère, répondit sur un ton ironique :

— Tu deviens romanesque, mon cher Gilles. Comme tante Eulalie, tu lis trop avant de te mettre au lit. Dompte ton imagination : elle te bourre le crâne de suppositions stupides et de personnages fictifs.

— Celui qui nous occupe n’est pas un héros de roman, et tu le sais. Ne me fais pas répéter son nom.

— Encore ! fit-elle avec de la colère dans les yeux, tu entres sur un terrain où tu n’as pas d’affaire.

— Alix, comprends-moi donc, je ne vous veux que du bien, Paul n’est pas heureux, et toi-même affirmerais-tu ton bonheur ?

— Quelle perspicacité ! Et tu as découvert tout ça, seul, en quelques semaines ? Paul doit t’avoir fait des confidences.

— Paul ne m’a rien dit ; ce que j’ai découvert n’est peut-être pas si caché. Et puis, lorsque l’on redoute un orage, on regarde souvent le ciel : le tien était