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— Et quoi donc !

— Je me suis acheté une automobile.

— Mes compliments ! Et quelle marque de machine as-tu choisie ?

— Je sais que c’est une torpédo, avec un siège réversible à l’arrière, et une tête de sauvage à l’avant.

— Un Pontiac, alors.

— Tout juste, c’est cela. Quels agréables moments on passe à s’acheter une auto !

— Raconte-moi tes émotions, veux-tu ?

— Volontiers. Voilà : je suis entrée dans un salon d’autos, et j’ai demandé à un grand gaillard qui sentait la gazoline :

— Elles sont à vendre ces machines-là ?

— Oh oui, madame.

— Je voudrais en acheter une, je dispose de douze cents dollars.

— Ma chère, si tu avais vu l’empressement, les civilités, les courbettes, les « Madame » par ici, les « Madame » par là, tout le personnel était ameuté. Ah, mais, on ne finissait plus de me rabattre les oreilles sur les qualités, la force, l’élégance, le confort, la perfection de telle et telle machine. Je devins agacée de ce bavardage et je lançai un peu raide :

— Messieurs, vous m’ennuyez. Que peuvent me faire les accélérateurs, les démarreurs, les carburateurs, les étinceleurs, les pistons, les soupapes, les couleurs citron ou marron de vos machines. Je veux une automobile pour aller à Gaspé, en avez-vous ?