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où nous avons logé. Voyons ce qu’il contient : des fruits, des biscuits, des gâteaux…

— Ce n’est pas si mal, remarqua Gilles occupé à mettre sur le napperon de beaux radis rouges. Mais que vois-je ! s’écria-t-il en regardant dans le panier de monsieur Bordier, un blessé ? là couché sur le côté, c’est tout rouge avec des bandages…

— Un blessé ! crièrent Alix et Béatrice en regardant autour d’elles, où ça ?

— Ici, dit Étienne en exhibant une bouteille de vin muscat.

— Oh ! s’exclama mademoiselle Vilet, le blessé sera un mort tout à l’heure, et son bouquet aura vécu !

On mangea à belles dents, et comme durant la collation le vent avait subitement cessé, Alix proposa de paresser un moment avant de se mettre en route. On fut d’accord pour prolonger la halte.

Pendant que monsieur Bordier et Gilles allumaient leurs cigarettes, les deux jeunes femmes prenaient une position confortable pour causer.

— Monsieur Bordier, demanda Alix, vous qui avez vécu longtemps dans les glaces et la désolation du Nord, vous devez jouir du spectacle qui nous entoure : cette mer câlinement bercée, ces rochers superbes, ces bois, cette verdure au loin, cette brise rafraîchissante, doivent l’emporter de cent coudées sur l’aridité et la bise glaciale de là-bas.

— Je jouis énormément de ce que vous venez de décrire, Alix, mais n’allez pas croire que le Nord soit dépourvu de beautés. Oh, non !