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augmenté de précieuses recrues. Ici prend fin notre vie de nomades, ajouta-t-elle en soupirant, demain nous ne nous appartiendrons plus. Que voulez-vous, la beauté doit se produire. Je ne parle pas pour toi, tu sais, Alix.

— Avant d’être soumises aux lois de l’étiquette, et pendant que ces messieurs grillent leur tabac, allons nous promener un peu sur le bord de la mer, suggéra Alix.

— Une bonne idée, viens.

Les deux amies s’éloignèrent, et se mirent à marcher sur la grève, à pas lents.

La mer était calme. Au loin, quelques voiles passaient, penchées, comme appuyées sur le ciel. Des mouettes volaient, lentes et gracieuses, des croissants d’azur dans la courbe de leurs ailes.

Madame Bordier et son amie marchèrent longtemps sans parler.

— Je ne sais pourquoi, dit tout à coup Alix, je me sens heureuse de vivre. Pourtant, j’ai plus d’une raison d’être inquiète.

— C’est un pressentiment ; il va t’arriver quelque chose de joyeux. Quand il te vient un bonheur soudain, Alix, comment le manifestes-tu ?

— Je le savoure en silence, mais il y a longtemps qu’il ne m’a pas été donné d’en goûter, ajouta-t-elle assombrie.

Sans avoir reçu des confidences, Béatrice savait son amie malheureuse, et s’en désolait. Elle reprit :