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— Pourrait-on transporter monsieur Bordier chez lui ?

— Où demeure-t-il ?

— À Québec.

— Il peut accomplir le voyage, mais ne tardez pas. Et compatissant il ajouta :

— Du courage, mon ami, et n’oubliez pas : évitez les émotions au malade.

On fit hâtivement les préparatifs de départ. Et pendant que Béatrice, Alix et Gilles prenaient place dans l’auto, Paul s’installait avec son père à bord du convoi pour revenir à Québec.

Étienne supporta assez bien le trajet, mais rendu chez lui, le mal fit des progrès rapides. Tante Marie qui en avait tant vu mourir, ne s’illusionna pas sur l’état de son neveu. Ses jours étaient comptés. Elle le savait. Et si elle pleurait en cachette, elle souriait toujours en s’approchant du malade. Ses mains ridées, aux doigts fluets, avaient des gestes adroits pour replacer les oreillers, border les couvertures. Et lorsque, attentive, elle s’assurait si rien ne manquait, au confort du père de Paul, elle faisait penser à la maman, qui, après avoir habillé son enfant pour un grand voyage, se prépare à le suivre. Et c’était vrai pour tante Marie Elle savait qu’elle allait suivre Étienne dans la tombe. Son vieux cœur ne pourrait pas supporter l’épreuve de ce dernier deuil.

On se releva au chevet du mourant.

Impressionnée par la vue de la mort qui approchait, Alix ne pouvait détacher son regard du visage émacié