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— Rien. Vivez sous mon toit ; j’y resterai le moins possible. Nous donnerons l’exemple d’un ménage mondainement très uni.

— Je préférerais ne pas entreprendre cette croisière, redit-elle avec lassitude.

— Pour le moment, vous n’avez pas le choix de vos décisions. Et que ferions-nous dans ce logis où le feu est éteint, vous auriez froid jusqu’à l’âme. À tous deux, le soleil de l’Équateur ne sera pas de trop pour réchauffer nos cœurs transis.

Ils partirent.

Sur le paquebot, ceux qui virent le couple si bien assorti de Paul Bordier et de sa femme, ne se doutèrent pas du désastre de leur vie conjugale ; car tout dans leurs relations extérieures, indiquait une entente complète. Paul et Alix dansèrent et prirent part à tous les amusements à bord. Rien ne les différenciait des autres passagers.

Paul fournissait à sa compagne les renseignements sur les pays qu’ils traversaient.

Mais comme l’enthousiasme qu’il ressentait autrefois devant les beautés naturelles était loin ! Sa voix résonnait étrange à ses oreilles. Elle était sans inflexion, ne vibrait plus. Rien ne venait l’animer et lui rendre sa chaleur des beaux jours.

— Ma voix, songeait-il, n’est plus vivante, parce que le cœur qui la faisait chanter, rire et pleurer, est ravagé. Un de ces jours, je visiterai cet endroit désolé pour voir ce qui peut y être ramassé.

En effet, il le visita un jour ce cœur qu’il croyait désert, et fut effrayé d’y trouver parmi les décombres,