Page:Brochard - Études de philosophie ancienne et de philosophie moderne.djvu/256

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
222
PHILOSOPHIE ANCIENNE

Δίων, σημαινόμενον δὲ αὐτὸ τὸ πρᾶγμα τό ὑπ’ αὐτῆς δηλούμενον…). C’est cet intermédiaire, qui est le λεκτόν, que Basilides voulait écarter, pour s’en tenir uniquement à ce qui est corporel.

Quoi qu’il en soit de ce point particulier, le nominalisme des stoïciens est hors de doute : c’est déjà une différence, et des plus considérables, entre leur logique et celle d’Aristote. Si les stoïciens sont conséquents avec eux-mêmes, s’ils n’ont pas usurpé cette réputation qu’ils ont toujours eue, d’avoir constitué un des systèmes les mieux liés dans toutes ses parties, de s’être montrés les plus habiles dialecticiens de l’antiquité, ils ont dû construire une logique purement nominaliste. Et c’est ce qu’ils ont fait.

Dès le premier abord, quand on examine les textes, à la vérité trop peu nombreux, qui nous ont été conservés, on s’aperçoit que la division des êtres en genres et en espèces ne tient que fort peu de place dans leur philosophie, et qu’elle n’en tient aucune dans leur logique. Sans doute, ils n’ignorent pas cette division : il leur arrive de la mentionner (Diog., VIII, 60 ; Sext., P., I, 138). Dans leur liste des catégories, ils admettent un genre suprême, γενικώτατον. Mais il est aisé de constater que ces classifications n’ont rien à voir avec la logique proprement dite. La logique n’a pas à s’occuper des ἐννοήματα (Simpl., Cat., 3 : τὸ περὶ ἐννοημάτων καθ’ ὁ ἐννοήματα λέγειν οὐ λογικῆς, ἀλλά τῆς περὶ ψυχῆς ἐστὶ πραγματείας). Prantl (p. 629) a d’ailleurs bien montré le caractère nominaliste de la théorie des catégories. Dans un système tel que le leur, il ne saurait être question de l’essence ou de la forme telles que l’entendaient les péripatéticiens. S’ils parlent de l’οὐσία, ils entendent par là cette matière sans forme, ἄποιος, ἄμορφος, qui ne peut ni croître ni diminuer, et qui, loin de distinguer les différents êtres, est la même chez tous. Ce qui constitue la nature propre de chaque être, ce n’est pas un élément commun à plusieurs êtres compris dans une même classe, c’est, au contraire, un ἰδίως ποιόν, une qualité individuelle et concrète, et par là, il faut entendre quelque chose de corporel, une certaine détermination de la matière, si bien que cette matière, qui est la qualité, s’ajoute à cette autre matière sans qualité qui est l’essence, et qu’il y a, à la lettre, en tout être, deux sujets ou deux matières (Plut., Com. not.,