Page:Brochard - Études de philosophie ancienne et de philosophie moderne.djvu/499

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que nous faisons, l’étude de la croyance ne doit-elle pas aussi tenir quelque place dans cette philosophie ? Que ce soit dans la psychologie ou dans la logique, c’est une autre question dont nous n’avons cure pour le moment. À coup sûr, le philosophe sans renoncer à son idéal de certitude, ne dérogera pas en s’en occupant.

Mais il y a plus : la théorie, trop facilement acceptée, qui distingue jusqu’à les opposer la certitude et la croyance, est elle-même fort contestable. Généralement, on évite d’insister sur ce point : il semble qu’on s’en réfère au sens commun pour reconnaître entre la certitude et la croyance une différence spécifique. Mais peut-être ne faudrait-il pas insister beaucoup auprès du sens commun pour obtenir de lui l’aveu qu’après tout, être certain est une manière de croire, et que si on peut croire sans être certain, on n’est pas certain sans croire : en d’autres termes, la croyance est un genre dont la certitude est une espèce. En réalité, les rapports de la certitude et de la croyance sont une question à débattre entre philosophes. Or, il se trouve plusieurs penseurs qui la résolvent tout autrement qu’on ne fait d’ordinaire. Stuart Mill disait déjà, mais sans insister, et sans en tirer aucune conséquence, que la certitude est une espèce de croyance. C’est à M. Renouvier qu’appartient incontestablement l’honneur d’avoir le premier montré toute l’importance de la question, et de l’avoir traitée avec cette vigueur et cette rigueur qui sont la marque distinctive de son esprit. D’autres après lui sont entrés dans la même voie, et, tout récemment, M. Gayte, dans la très intéressante étude que nous signalions au début de cet article, a examiné, en ajoutant beaucoup d’arguments nouveaux, tous les points principaux de ce grave sujet : l’histoire d’abord, du moins l’histoire moderne, car les théories anciennes sur la croyance, fort curieuses et fort importantes, demanderaient à elles seules tout un volume : puis l’objet de la croyance, ses rapports avec l’évidence, avec la passion, avec la volonté. Nous voudrions, à notre tour, examiner avec M. Gayte, mais en les envisageant sous un aspect un peu différent, les deux questions essentielles à nos yeux dans la théorie de la croyance, celle de l’évidence et celle du rôle de la volonté dans la croyance.


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