Page:Brochard - Études de philosophie ancienne et de philosophie moderne.djvu/522

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on ne rencontrait plus de ces esprits tranchants et absolus, qui ne doutent de rien, n’admettent aucune contradiction, méprisent ceux qui ne croient pas ce qu’ils croient, et sont toujours prêts à imposer leurs opinions par le fer et par le feu ? On n’est pas réduit pour cela à être sceptique ou à croire mollement. Après de mûres réflexions et de sérieuses recherches, on peut s’arrêter de propos délibéré à des croyances désormais fermes et inébranlables. La plupart du temps, ce qui décide de nos croyances, c’est le hasard de l’éducation ou de la naissance, ou les exemples que nous avons eus sous les yeux, ou les premiers livres que nous avons lus, ou les premiers maîtres que nous avons entendus. Nos convictions seraient-elles moins fortes, si au lieu de les avoir subies aveuglément, nous les avions formées en connaissance de cause, après réflexion, à l’âge d’homme ? La croyance peut s’établir solidement sans renier ses origines. Si maintenant, en raison de ces origines, on songe que peut-être, malgré sa bonne volonté, on n’a pas pris la meilleure voie, si une ombre légère de doute flotte parfois autour des croyances, qu’on n’a admises pourtant qu’à bon escient, si on est indulgent pour les autres, si on garde son esprit libre et accessible à toute idée nouvelle, où sera le mal ? C’est une pensée de derrière la tête qui en vaut bien une autre. La vraie conclusion de la théorie de la croyance volontaire est une grande leçon de tolérance.