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VI

SUR LE « BANQUET » DE PLATON



Le Banquet est parmi les dialogues de Platon un des plus clairs et des plus accessibles. On peut le lire d’un bout à l’autre sans se heurter à des difficultés comme celles qui nous arrêtent si souvent dans le Sophiste ou le Parménide. Dès la première lecture un esprit attentif peut légitimement se flatter d’embrasser en ce qu’elle a d’essentiel la théorie de l’auteur, d’en pénétrer le sens exact, d’en découvrir les beautés. Cependant, s’il veut y regarder de près, le même lecteur ne tardera pas à se poser quelques questions qui ne se résolvent pas d’elles-mêmes.

Le dialogue est manifestement composé de trois parties, qui sont : les cinq premiers discours sur l’amour, puis celui de Socrate, enfin celui d’Alcibiade. Mais quel rapport y a-t-il entre la première et la seconde de ces trois parties ? Faut-il, comme on l’a fait souvent, mettre au compte de Platon les idées exposées dans les cinq discours et les considérer tous comme des fantaisies où s’essaye, se joue et s’attarde l’imagination du philosophe avant de trouver dans le discours de Socrate la formule exacte et définitive de sa pensée ? Ou bien, au contraire, doit-on voir dans ce dernier discours une réponse au précédent, si bien que la seconde partie du dialogue, loin d’être la continuation de la première, serait en pleine opposition avec elle et apparaîtrait comme une véritable réfutation ? De plus, il semble à première vue que tous les con-