Page:Brocher - Souvenirs d’une morte vivante, 1909.pdf/279

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
255
SOUVENIRS D’UNE MORTE VIVANTE

la fin de la lutte, si je ne suis pas tuée ; en jupe longue on ne peut marcher, puis je ne peux me décider à me travestir pendant que mes amis restent en costumes officiels.

Nous étions encore une dizaine ; ces braves gens ont été admirables de dévouement, ils ont trouvé des habillements pour tous, plus ou moins corrects ; pour moi, comme je suis petite, c’était assez difficile, mais le pharmacien se souvint que son attrape-science était à peu près de ma taille ; il lui demanda son pantalon, un gilet et une jaquette qu’il donna de bon cœur ; le gamin était heureux et fier de donner son costume à une citoyenne, comme il disait si gentiment. La femme du pharmacien m’offrit à son tour un plastron-chemisette, col et cravate, en un mot, j’étais beaucoup trop chic pour ce que nous allions faire, et surtout j’étais fort peu à l’aise pour me mouvoir dans mon nouveau costume, qui m’était un peu étroit. À côté de la pharmacie, il y avait une boutique de coiffeur, j’y entre.

— Monsieur, lui dis-je, je désire que vous me coupiez les cheveux.

Il comprit pourquoi, cependant il hésitait :

— C’est dommage, madame, vous avez de beaux cheveux, il faudra bien des années pour qu’ils reviennent comme ils sont, et encore, les cheveux coupés à un certain moment ne reviennent jamais aussi beaux. Puis voyez-vous dans deux ou trois jours, tout sera fini, alors vous regretterez de ne plus les avoir.

— Je veux que mes cheveux soient coupés, lui répondis-je.