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— Et vous êtes tout à fait dans l’erreur, Mathilde, en supposant que Harry Meltham vous admire ; je vous assure qu’il n’en est rien. »

Mathilde allait répondre avec colère ; mais heureusement notre voyage était arrivé à sa fin, et la dispute fut coupée court par le laquais ouvrant la portière et baissant le marche-pied pour notre descente.




CHAPITRE XI.

Les paysans.


N’ayant plus qu’une élève, quoiqu’elle me donnât plus de peine que trois ou quatre, et quoique sa sœur prît encore des leçons d’allemand et de dessin, j’avais beaucoup plus de temps à ma disposition que je n’en avais jamais eu depuis que j’avais pris le joug de gouvernante ; temps que j’employais partie à correspondre avec mes amis, partie à lire, à étudier, à pratiquer la musique, le chant, etc. ; et partie à me promener dans le domaine ou les champs adjacents, avec mes élèves, si elles désiraient ma compagnie ; seule, si elles ne se souciaient point de m’avoir avec elles.

Souvent, quand elles n’avaient point sous la main de plus agréable occupation, les miss Murray s’amusaient à visiter les pauvres paysans qui demeuraient sur le domaine de leur père, pour recevoir leurs hommages flatteurs ou pour entendre les anciennes histoires et les commérages racontés par les vieilles femmes ; ou peut-être pour le plaisir plus pur de faire des heureux par leur présence et leurs dons, si aisément accordés, reçus avec tant de reconnaissance. Quelquefois j’étais priée d’accompagner l’une des deux sœurs ou toutes les deux dans ces visites, et quelquefois on me demandait d’y aller seule pour remplir quelque promesse qu’elles avaient été plus promptes à faire qu’à tenir, pour porter quelques petits dons, ou faire la lecture à ceux qui étaient malades où tristes. De cette façon, je fis quelques connaissances parmi les paysans ; et, de temps en temps, j’allais leur rendre visite pour mon propre compte.