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oncle de Lothaire et de Charles, eut à Compiègne en 959, avec la reine Gerberge, pour raccommoder ses neveux brouillés à l’occasion de certains châteaux dont Lothaire s’était saisi dans la Bourgogne, au rapport de Frodoard. Voilà la spoliation exercée contre Charles, qui probablement ne possédait que ces quelques châteaux ; 4o la précaution de Lothaire d’associer à sa couronne, en 978, son fils Louis, âgé seulement de dix ans, dans la crainte que Charles, créé duc de Lorraine l’année précédente par l’empereur Othon, ne formât quelque dessein contre lui[1].

Ces considérations et ces rapprochements paraissent établir la vraisemblance du fait allégué. D’ailleurs Lothaire put croire qu’il agissait dans la plénitude de son droit en dépouillant son jeune frère, car il avait été investi de la royauté, d’une manière absolue, avant la naissance de son frère Charles, soit à la fin de 951 lors de la maladie de Louis d’Outremer en Auvergne, soit en 948, à la suite du concile d’Ingelheim, où Louis avait porté ses plaintes contre Hugues le Grand, son persécuteur, et à la suite duquel il put songer à faire reconnaître son fils pour roi soit même dès 946, comme cela résulte non pas seulement d’un acte de l’an 40 du règne de Lothaire, acte que M. Bernard avoue n’avoir pu retrouver, mais de quarante chartes que nous avons pu dater de 946, et parmi elles de trois de la 40e année de Lothaire, qui avait incontestablement une priorité d’âge et de royauté sur son frère Charles.

C’est donc à tort que les Bénédictins, auteurs de l’Art de vérifier les dates, ont écrit que Charles, fils de Louis d’Outremer, n’a pas régné « tant à cause de son bas âge que parce qu’il ne restait plus alors au roi de France aucune ville en propre que Reims et Laon[2]. » Dans leur 3e édition, à l’article de Lothaire, ils ajoutent : « Charles, son frère, contre l’usage, n’eut, comme on l’a dit, aucune part dans le royaume, et dès lors commença à s’établir la loi qui adjuge la couronne à un seul prince du sang royal[3]. » Ce n’est point à cause de son bas âge ni parce que le roi Louis d’Outremer n’avait plus que deux villes en propre que Charles n’eut point sa part dans l’héritage paternel, c’est parce

    rieures à celles-ci, et l’on ne peut faire, à leur endroit, le même raisonnement.

  1. Voir les brochures de M. Bernard, citées ci-dessus.
  2. Art de vérifier les dates, 2e édit., p. 542.
  3. Art de vérifier les dates, 3e édit., t. I, p. 564.