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LES MAÎTRES CHANTEURS

seau fantôme, de si farouche, de si furieuse poésie, nous fait frémir. Mais les Maîtres Chanteurs de Nuremberg, drame d’âmes, comédie de sentiments, c’est la vie, la vie simple et familière que nous vivons nous-mêmes, la vie d’hier, d’aujourd’hui, de demain, la vie de notre cœur et de notre esprit, et cela me semble encore plus beau que tout le reste.

Cependant, si, de ce drame, de cette comédie — les Maîtres Chanteurs, je le répète, sont l’un et l’autre, étant la vie — ne se dégageait un grand et haut symbole, nous n’y trouverions point l’extraordinaire magnificence dont nous sommes éblouis. Ce symbole apparaît avec une telle clarté qu’il est inutile d’en donner la moindre explication. Il surgit, en pleine lumière, du mouvement de chaque scène, du caractère de chaque personnage, et nous le comprenons d’autant mieux qu’il fixe en traits significatifs non pas les vagues catastrophes d’un jadis incertain, mais les incidents réels de notre existence quotidienne. L’action des Maîtres Chanteurs de Nuremberg, il est vrai, se passe au XVIe siècle, mais sur cette question de dates, dont tant de personnes font une question de doctrine, je suis absolument de l’avis de M. Alfred Ernst, qui, dans son livre, l’Art de Richard Wagner, a écrit ceci : « Il ne faudrait