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MUSIQUES D’HIER ET DE DEMAIN

très périlleux, si elle se généralisait. Après avoir constaté en de récentes productions françaises l’influence directement italienne de Cavalleria rusticana, il serait déplorable que cette influence, dont, il faut bien le reconnaître, la partition de la Navarraise, par la coupe de ses deux tableaux, la contexture de ses scènes, son dramatique outrancier, porte quelques traces, se fortifiât, grâce à la prestigieuse virtuosité de M. Massenet, le compositeur de ce temps à qui l’on a coutume d’emprunter avec le moins de sans-gêne des procédés faciles, le musicien charmeur et enjôleur par excellence, le maître aux irrésistibles séductions dont le reflet sur d’innombrables disciples jaillit si intense et si tenace.

On me comprendra mieux en lisant le résumé du poème que MM. Henri Cain et Jules Claretie ont tiré d’une courte et saisissante nouvelle de ce dernier, la Cigarette, poème très vivant, très bien agencé en vue de l’effet, mais, en fin de compte, si bref, si ramassé, si uniquement anecdotique et pittoresque, qu’il assigne au chant et à la symphonie un rôle tout à fait secondaire et assez peu conforme à celui qui leur est dévolu, aussi bien dans le drame lyrique moderne que dans l’opéra de tous les temps. Le libretto de la Navarraise ne haussant pas jusqu’à la pleine