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LA NAVARRAISE

blessé aux avant-postes, expire en maudissant la Navarraise, folle ricanante, que la douleur abat aux pieds du cadavre.

On voit maintenant quelle peut être la part de la musique, souveraine confidente d’âmes, dans ce drame à la fois si sommaire et si excessif, et surtout, je le répète, si exclusivement extérieur et pittoresque. Au début, cette part est réduite à sa plus simple expression, la fusillade et la canonnade accaparant tout le clavier sonore. Peu à peu, cependant, de ce fracas des thèmes surgissent qui reparaîtront, mais ne se transformeront point. Le premier, clamé par les cuivres, se rapporte évidemment à Zuccarraga ; un second, chanté par les violons en une sorte de frénésie démente, dit l’amour incendiaire de la Navarraise pour son beau sergent ; un autre — c’est la supplication au père — qui, par son aspect, rappelle les mélodies anciennes de M. Verdi, est exposé vocalement et aboutit de suite à un unisson très italien. Je note ensuite, au galop de l’action, un joli arrangement de la Jota populaire, fraîcheur en ces harmonies tragiques.

D’autres contrastes, un peu trop traditionnels, sont ménagés par une chanson à boire de soldats où s’affirme de façon fort plaisante la personnalité de M. Massenet et un très doux nocturne, entr’acte instrumental, de signification sympho-