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loux en grande masse répondent encore aux couches de matières dures et aux marbres qui servent de base aux collines composées de matières calcinables.

L’eau, en coulant par les fentes perpendiculaires et en pénétrant les couches de ces sables vitrifiables, de ces grès, de ces argiles, de ces ardoises, se charge des parties les plus fines et les plus homogènes de ces matières, et elle en forme plusieurs concrétions différentes, telles que les talcs, les amiantes et plusieurs autres matières qui ne sont que des productions de ces stillations de matières vitrifiables, comme nous l’expliquerons dans notre Discours sur les minéraux.

Le caillou, malgré son extrême dureté et sa grande densité, a aussi, comme le marbre ordinaire et comme la pierre dure, ses exsudations, d’où résultent des stalactites de différentes espèces, dont les variétés dans la transparence, les couleurs et la configuration, sont relatives à la différente nature du caillou qui les produit, et participent aussi des différentes matières métalliques ou hétérogènes qu’il contient : le cristal de roche, toutes les pierres précieuses, blanches ou coloriées, et même le diamant, peuvent être regardés comme des stalactites de cette espèce. Les cailloux en petite masse, dont les couches sont ordinairement concentriques, sont aussi des stalactites et des pierres parasites du caillou en grande masse, et la plupart des pierres fines opaques ne sont que des espèces de caillou ; les matières du genre vitrifiable produisent, comme l’on voit, une aussi grande variété de concrétions que celles du genre calcinable ; et ces concrétions produites par les cailloux sont presque toutes des pierres dures et précieuses, au lieu que celles de la pierre calcinable ne sont que des matières tendres et qui n’ont aucune valeur.

On trouve les fentes perpendiculaires dans le roc et dans les lits de caillou en grande masse, aussi bien que dans les lits de marbre et de pierre dure : souvent même elles y sont plus larges, ce qui prouve que cette matière, en prenant corps, s’est encore plus desséchée que la pierre : l’une et l’autre de ces collines dont nous avons observé les couches, celle de matières calcinables et celle de matières vitrifiables, sont soutenues tout au-dessous sur l’argile ou sur le sable vitrifiable, qui sont les matières communes et générales dont le globe est composé, et que je regarde comme les parties les plus légères, comme les scories de la matière vitrifiée dont il est rempli à l’intérieur ; ainsi toutes les montagnes et toutes les plaines ont pour base commune l’argile ou le sable. On voit par l’exemple du puits d’Amsterdam, par celui de Marly-la-Ville, qu’on trouve toujours, au plus profond, du sable vitrifiable : j’en rapporterai d’autres exemples dans mon Discours sur les minéraux.

On peut observer dans la plupart des rochers découverts que les parois des fentes perpendiculaires se correspondent aussi exactement que celles d’un morceau de bois fendu, et cette correspondance se trouve aussi bien dans les fentes étroites que dans les plus larges. Dans les grandes carrières de l’Arabie, qui sont presque toutes de granit, ces fentes ou séparations perpendiculaires sont très sensibles et très fréquentes, et quoiqu’il y en ait qui aient jusqu’à vingt et trente aunes de large, cependant les côtés se rapportent exactement et laissent une profonde cavité entre les deux. (Voyez Voyage de Shaw, vol. II, page 83.) Il est assez ordinaire de trouver dans les fentes perpendiculaires des coquilles rompues en deux, de manière que chaque morceau demeure attaché à la pierre de chaque côté de la fente : ce qui fait voir que ces coquilles étaient placées dans le solide de la couche horizontale lorsqu’elle était continue, et avant que la fente s’y fût faite. (Voyez Woodward, page 298.)

Il y a de certaines matières dans lesquelles les fentes perpendiculaires sont fort larges, comme dans les carrières que cite M. Shaw ; c’est peut-être ce qui fait qu’elles y sont moins fréquentes ; dans les carrières de roc vif et de granit les pierres peuvent se tirer en très grandes masses : nous en connaissons des morceaux, comme les grandes obélisques et les colonnes qu’on voit à Rome en tant d’endroits, qui ont plus de 60, 80, 100 et 150 pieds de