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HISTOIRE NATURELLE DES MINÉRAUX




DE LA FIGURATION DES MINÉRAUX.

Comme l’ordre de nos idées doit être ici le même que celui de la succession des temps, et que le temps ne peut nous être représenté que par le mouvement et par ses effets, c’est-à-dire par la succession des opérations de la nature, nous la considérerons d’abord dans les grandes masses qui sont les résultats de ses premiers et grands travaux sur le globe terrestre ; après quoi nous essaierons de la suivre dans ses procédés particuliers, et tâcherons de saisir la combinaison des moyens qu’elle emploie pour former les petits volumes de ces matières précieuses, dont elle paraît d’autant plus avare qu’elles sont en apparence plus pures et plus simples ; et, quoiqu’en général les substances et leurs formes soient si différentes qu’elles paraissent être variées à l’infini, nous espérons qu’en suivant de près la marche de la nature en mouvement, dont nous avons déjà tracé les plus grands pas dans ses époques, nous ne pourrons nous égarer que quand la lumière nous manquera, faute de connaissances acquises par l’expérience encore trop courte des siècles qui nous ont précédés.

Divisons, comme l’a fait la nature, en trois grandes classes toutes les matières brutes et minérales qui composent le globe de la terre ; et d’abord considérons-les une à une, en les combinant ensuite deux à deux, et enfin en les réunissant ensemble toutes trois.

La première classe embrasse les matières qui, ayant été produites par le feu primitif, n’ont point changé de nature[NdÉ 1], et dont les grandes masses sont celles de la roche intérieure du globe et des éminences qui forment les

  1. Ainsi que j’ai fait remarquer ailleurs, nous ne connaissons aujourd’hui aucune roche dont on puisse dire qu’elle date de la solidification de la surface de la terre et qu’elle n’a subi aucune modification ultérieure. Si l’on admet que le globe terrestre, après sa solidification, a été d’abord entièrement recouvert par des eaux très riches en acide carbonique et en oxygène et ayant une température très élevée, on est obligé d’admettre que ces eaux ont puissamment agi, en les modifiant, sur les matières qui tapissaient le lit de l’océan universel ou celui des mers locales qui ont successivement recouvert les divers points du globe. « La première croûte solide de la terre, due au refroidissement de sa surface en fusion, dit Credner, n’appartient pas aux roches éruptives, c’est-à-dire aux roches qui se sont élevées à l’état fluide de l’intérieur de la terre. On a quelquefois considéré certains granits comme représentant la couche primitive de notre globe ; mais cette croûte primitive n’est connue