Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome II, partie 3.pdf/86

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uniforme et homogène dans toutes ses parties ; l’argile la plus ductile, et qui paraît la plus simple, est encore mêlée de particules quartzeuses, ou d’autres sables vitreux qui n’ont pas subi toutes les altérations qu’ils doivent éprouver pour se convertir en argile : ainsi la plus pure des argiles sera seulement celle qui contiendra le moins de ces sables ; mais comme la substance de l’argile et celle de ces sables vitreux est au fond la même, on doit distinguer, comme nous le faisons ici, ces argiles, dont la substance est simple, de toutes les glaises, qui toujours sont mêlées de matières étrangères. Ainsi, toutes les fois qu’une argile ne sera mêlée que d’une petite quantité de particules de quartz, de jaspe, de feldspath, de schorl et de mica, on peut la regarder comme pure, parce qu’elle ne contient que des matières qui sont de sa même essence, et au contraire toutes les argiles mêlées de matière d’essence différente, telles que les substances calcaires, pyriteuses et métalliques, seront des glaises ou argiles impures.

On trouve les argiles pures dans les lieux dont le fond du terrain est de sable vitreux,

    apercevait quelques veines jaunâtres : on trouva ensuite un autre lit de la même espèce de pierre, sous lequel l’argile était très noire, très dure et remplie de coquilles comme les couches supérieures ; plusieurs de ces coquilles étaient revêtues d’un côté par une incrustation terreuse, disposée par rayons ou filets brillants, et les coquilles elles-mêmes brillaient d’une belle couleur d’or, surtout les bélemnites qui étaient aussi la plupart bronzées, particulièrement d’un côté ; cette couleur métallique, que les naturalistes ont nommée armature, est produite, à mon avis, sur la superficie des coquilles fossiles, par des sucs pyriteux, dont les stillations des eaux se trouvent chargées, et l’acide vitriolique ou alumineux qui entre toujours dans la composition des pyrites y fixe la terre métallique qui sert de base à ces concrétions, comme l’alun dans les teintures attache la matière colorante sur les étoffes, de sorte que la dissolution d’une pyrite ferrugineuse, communique une couleur de rouille ou quelquefois de fer poli aux matières qui en sont imprégnées ; une pyrite cuivreuse, en se décomposant, teint en jaune brillant et couleur d’or la surface de ces mêmes matières, et la couleur des talcs dorés peut être attribuée à la même cause.

    On n’aperçut plus dans la suite ni plâtre, ni charbon de terre : l’eau continuait toujours à se répandre, et l’ouvrage ayant été discontinué pendant huit jours, la fouille étant alors profonde de trente-six pieds, elle s’éleva à la hauteur de dix, et lorsqu’on l’eut épuisée pour continuer le travail, les ouvriers en trouvaient le matin un peu plus d’un pied, qui tombait pendant la nuit au fond de la fouille, de différentes petites sources.

    À quarante pieds de profondeur, on trouva une couche de terre d’environ un pied d’épaisseur, à peu près de la couleur des couches précédentes, mais beaucoup moins dure, sur laquelle, au premier coup d’œil, on croyait apercevoir une infinité d’impressions de feuilles de plantes du genre des capillaires, qui paraissaient former sur cette terre une espèce de broderie d’une couleur moins brune que celle du fond de la couche, dont toutes les feuilles ou petites stratifications portaient de pareilles impressions, en quelque nombre de lames qu’on les divisât ; mais en examinant avec attention cette espèce de schiste, il me parut que ce que je prenais d’abord pour des impressions de feuilles de plantes n’était qu’une sorte de végétation minérale, qui n’avait pas la régularité que laisse l’impression des plantes sur les terres molles ; cette matière s’enflammait dans le feu et exhalait une odeur bitumineuse très pénétrante ; aussi la regarde-t-on ordinairement comme une annonce de la mine de charbon de terre.

    De quarante à cinquante pieds, on ne trouva plus de cette sorte de terre, mais une argile noire beaucoup plus dure encore que celle des lits supérieurs, qu’on ne pouvait arracher qu’à l’aide des coins et de la masse, et qui se levait en très grandes lames : cette terre contenait beaucoup moins de coquilles que les autres couches, et malgré sa grande dureté elle s’amollissait assez promptement à l’air et s’exfoliait comme de l’ardoise pourrie ; en ayant mis un morceau dans le feu, elle y pétilla jusqu’à ce qu’elle eût été réduite en poussière, et elle exhala une odeur bitumineuse très forte, mais elle ne produisit cependant qu’une flamme très faible ; à cette profondeur on cessa de creuser, et l’eau s’éleva peu à peu à la hauteur de trente pieds. (Mémoire rédigé par M. Nadault.)