Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 2.djvu/461

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avons vu, dans l’histoire du chien[1], que ces animaux perdent la faculté d’aboyer dans les pays chauds ; mais l’aboiement est remplacé par une espèce de hurlement, et ils ne sont jamais, comme ces animaux trouvés en Amérique, absolument muets. Les chiens transportés d’Europe ont à peu près également réussi dans les contrées les plus chaudes et les plus froides d’Amérique, au Brésil et au Canada, et ce sont de tous les animaux ceux que les sauvages[2] estiment le plus ; cependant ils paraissent avoir changé de nature ; ils ont perdu leur voix dans les pays chauds, la grandeur de la taille dans les pays froids, et ils ont pris presque partout des oreilles droites : ils ont donc dégénéré, ou plutôt remonté à leur espèce primitive, qui est celle du chien de berger, du chien à oreilles droites, qui de tous est celui qui aboie le moins. On peut donc regarder les chiens comme appartenant uniquement à l’ancien continent, où leur nature ne s’est développée tout entière que dans les régions tempérées, et où elle paraît s’être variée et perfectionnée par les soins de l’homme, puisque dans tous les pays non policés et dans tous les climats excessivement chauds ou froids, ils sont également petits, laids et presque muets.

L’hyène[3], qui est à peu près de la grandeur du loup, est un animal connu des anciens, et que nous avons vu vivant ; il est singulier par l’ouverture et les glandes qu’il a situées comme celles du blaireau, desquelles il sort une humeur d’une odeur très forte : il est aussi très remarquable par sa longue crinière, qui s’étend le long du cou et du garrot ; par sa voracité, qui lui fait déterrer les cadavres et dévorer les chairs les plus infectes, etc. Cette vilaine bête ne se trouve qu’en Arabie ou dans les autres provinces méridionales de l’Asie ; elle n’existe point en Europe, et ne s’est pas trouvée dans le nouveau monde.

Le chacal[4] qui de tous les animaux, sans même en excepter le loup, est celui dont l’espèce nous paraît approcher le plus de l’espèce du chien, mais qui cependant en diffère par des caractères essentiels, est un animal très commun en Arménie, en Turquie, et qui se trouve aussi dans plusieurs autres provinces de l’Asie et de l’Afrique ; mais il est absolument étranger au nouveau continent. Il est remarquable par la couleur de son poil, qui est d’un jaune brillant ; il est à peu près de la grandeur d’un renard : quoique l’espèce en soit très nombreuse, elle ne s’est pas étendue jusqu’en Europe, ni même jusqu’au nord de l’Asie.

La genette[5], qui est un animal bien connu des Espagnols puisqu’elle

  1. Voyez l’article du chien.
  2. Voyez l’Histoire du nouveau monde, par Jean de Læt, liv. xv, chap. xv, p. 513.
  3. Hyœna. Aristotelis, Hist. animal.Dabuh Arabum. Charleton, Exer., p. 15.
  4. Lupus aureus… Jackall. Ray, Synops. quadrup., p. 174. — Asiaticum animal. Adil, nuncupatum. Belon, Obs., p. 160. — Canis flavus… Le loup doré. Brisson, Règne animal, p. 237.
  5. Genetta. Belon, Observ., p. 76. — Genetta. Catus Hispaniæ Genethocatus. Charleton, Exer., p. 20, — La genette. Brisson, Règne animal, p. 252.