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THÉORIE DE LA TERRE.

Au reste, il ne faut qu’une très petite cause pour produire ces terribles effets ; il suffit de quelques flocons de neige tombés d’un arbre ou d’un rocher, ou même du son des cloches, du bruit d’une arme à feu, pour que quelques portions de neige se détachent du sommet, se pelotonnent et grossissent en descendant jusqu’à devenir une masse aussi grosse qu’une petite montagne.

Les habitants des contrées sujettes aux lavanges ont imaginé des précautions pour se garantir de leurs effets ; ils placent leurs bâtiments contre quelques petites éminences qui puissent rompre la force de la lavange : ils plantent aussi des bois derrière leurs habitations ; on peut voir au mont Saint-Gothard une forêt de forme triangulaire, dont l’angle aigu est tourné vers le mont, et qui semble plantée exprès pour détourner les lavanges et les éloigner du village d’Urseren et des bâtiments situés au pied de la montagne ; et il est défendu, sous de grosses peines, de toucher à cette forêt, qui est, pour ainsi dire, la sauve-garde du village. On voit de même, dans plusieurs autres endroits, des murs de précaution dont l’angle aigu est opposé à la montagne, afin de rompre et détourner les lavanges ; il y a une muraille de cette espèce à Davis, au pays des Grisons, au dessus de l’église du milieu, comme aussi vers les bains de Leuk ou Louèche en Valais. On voit dans ce même pays des Grisons et dans quelques autres endroits, dans les gorges de montagne, des voûtes de distance en distance, placées à côté du chemin et taillées dans le roc, qui servent aux passagers de refuge contre les lavanges. (Add. Buff.)