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la province de Québec

dans toutes les phrases stéréotypées, que cette richesse est inépuisable. Le mot « inépuisable » répond à tout. Nous sommes entourés ici de choses inépuisables ; nous nageons dans l’inépuisable. Nos forêts aussi étaient inépuisables, il n’y a pas longtemps, et, cependant, c’est à qui aujourd’hui jettera le cri d’alarme en présence des vides effrayants qui se font dans leurs « épais ombrages », en présence de la disparition presque complète de ces beaux bois de construction et de mâture qui, eux aussi, étaient inépuisables avant d’être épuisés.

* * *

Heureusement que nous n’en sommes pas encore, à propos de nos lacs, rendus à la période de l’alarme. Il y en a tant, tant surtout dans des régions encore à peu près inconnues, presque aussi vierges que l’étaient bon nombre de nos forêts, il y a moins d’un demi-siècle ! Naguère, une région inhabitée d’un pays aussi peu connu que l’était la province de Québec pouvait rester longtemps lettre close à tout autre qu’au chasseur ou au pêcheur s’aventurant jusqu’aux plus lointaines solitudes ; mais aujourd’hui, il n’y a plus de région, quelque inaccessible qu’elle ait paru, qui ne s’entrouvre rapidement sous le passage des locomotives précédant parfois même les défricheurs, et faisant entendre leurs mugissements là où il n’y a encore aucune habitation humaine, aucun chemin, aucun indice ni aucune trace du passage de l’homme.