Page:Buies - La Province de Québec, 1900.djvu/89

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

plus en plus vers le ciel les graminées portant l’espoir et l’aliment du colon : déjà apparaissait, dans sa virginité farouche, le Nord, ce Nord immense et redoutable encore, que nulle frontière ne limite et qui n’est borné que par l’impossibilité d’habiter des régions où la terre se refuse à produire, et où le climat rend inutiles le travail et l’énergie de l’homme. Devant soi, à perte de vue, s’étendait donc maintenant ce Nord profond, regardé jusque-là comme impénétrable, ce Nord protecteur, redoutable désormais pour tout autre seulement que les Canadiens-Français, et qui allait devenir le boulevard inviolable et sùr de leur nationalité.


II


C’est qu’il faut que les destinées s’accomplissent, il faut que les évolutions aient leur cours et que les peuples entrent dans leur voie, indépendamment des actions humaines, indépendamment de leur concours, tout aussi bien que de leur négligence ou de leur hostilité.

La race canadienne-française est aujourd’hui maitresse presque absolue du vaste versant septentrional du Saint-Laurent. Seule elle y a fondé des établissements durables, des colonies de plus en plus imposantes par le nombre, la vigueur et l’étendue. C’est sur ce versant que sont la plupart des grands fleuves, des grands pouvoirs hydrauliques. Le fleuve Saint-Laurent semble la barrière qui protège la nationalité franco-canadienne, lui assure un déploiement libre, la garantit contre l’invasion étrangère et lui donne la