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Monseigneur va à Rome pour voir les trois zouaves canadiens qui ont été faits caporaux et leur faire connaître l’admiration délirante que ces distinctions ont soulevée parmi les Bas-Canadiens.

Il dit qu’il se rend au concile ; ce n’est qu’un prétexte. Je connais mieux l’humilité de Monseigneur ; il va à Rome pour fumer une vieille pipe du tabac que le Nouveau-Monde a expédié aux zouaves l’automne dernier, afin qu’on ne dise pas qu’il n’a pas eu sa part de tout ce qui se donne dans son diocèse.

Monseigneur sera bien trois mois absent, — trois mois de repos pour les donateurs et donatrices ! — à moins que le concile ne le retienne pour mûrir longuement la réponse qu’il doit faire à la question suivante :

« Le mollet de saint Vital, saint ciré de Varennes, qu’une brave femme de l’endroit s’est mis dans l’œil, donne-t-il d’assez belles espérances pour qu’on puisse vendre aisément une autre carcasse cinq cents dollars, au lieu de 250 que Vital a coûtés à la paroisse de Varennes ? »

Monseigneur, qui n’est pas embarrassé lorsqu’il s’agit de tripotage dit religieux, répondra que son diocèse n’a pas de grands moyens, que des centaines de familles, accablées par la misère, émigrent en foule, que des milliers d’enfants aux trois quarts gelés parcourent les rues en demandant l’aumône, mais qu’on trouve toujours à extorquer de l’argent de ces malheureux pour quelque spéculation sacrée ; que les séminaires qui sont très-riches, et les jésuites qui sont en train de le devenir, n’achètent jamais de saints cirés, mais que ces bêtises-là sont toujours bonnes pour les pauvres habitants qu’on attrape comme on veut ; qu’il est encore facile de placer une demi-douzaine de carcasses prises n’importe où, auxquelles on donnera tous les noms de saints qu’on voudra, mais qu’il faut se dépêcher, afin d’empocher les premiers gains que les habitants feront au printemps sur la vente de leur beurre et de leur veaux…&…

Le tout pour la plus grande gloire de Dieu.

Et le Pape invitera tous les peuples de la terre à lui envoyer chacun un million de francs pour acheter de la cire et expédier les corps. Les saints, n’étant pas cotés dans l’industrie, coûtent un prix de transport exorbitant.

LES SAINTS DU CALENDRIER

On trouve la vie de saint Macaire d’Alexandrie dans l’histoire de Pallade et dans celle de Rufin.

Il y a une jolie anecdote d’une grappe de raisin qu’on apporta à saint Macaire ; il l’admira et l’envoya à un solitaire malade, lequel