Page:Buies - La lanterne, 1884.djvu/223

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


LA LANTERNE


No 17




Je suis obligé d’avouer aujourd’hui, malgré qu’il m’en coûte, que l’évêque de Montréal est un homme d’une grande valeur.

Il est parti pour Rome avec 20 à 30,000 piastres.

Cet aveu arraché à ma conscience repentante, j’entre dans l’examen des choses extraordinaires qui ont marqué le départ de l’évêque.

C’est le 20 janvier, 1869, le mercredi après-midi, que monseigneur Ignace, par la grâce de Dieu et les souscriptions de ses ouailles, a quitté le sol canadien pour aller rejoindre le Concile œcuménique qui sera ou qui ne sera pas convoqué en décembre prochain, suivant que Napoléon iii sera mort ou vivant. S’il est mort, il est bien certain qu’il n’y aura pas de Concile, puisqu’il n’y aura plus de chassepots à Rome.

Ce départ précipité pour un rendez-vous qui n’aura lieu que dans un an, s’explique par les raisons suivantes :

1o. L’évêque, qui est un saint homme, et qui, par conséquent, a horreur des vaines disputes de ce monde, veut soustraire sa personne à l’enquête qui se fera sur l’emploi des cent mille dollars qu’il a reçus pour bâtir un temple dans Montréal, et part en laissant à son bedeau toute la responsabilité de cette grave situation.

2.o L’évêque convaincu qu’il n’y a plus rien à soutirer de la bourse des fidèles, après les razzias répétées de l’année dernière, a jugé que sa présence à Montréal, ne pouvant plus être nuisible, serait inutile, et il va porter à Pie ix le produit net des bénédictions papales, ses frais de voyage payés.

3.o L’évêque dont la santé s’est altérée à faire tant de discours pour remercier les gens qui lui donnaient de l’argent, ne peut plus supporter le carême, et il va se rétablir à la table des évêques et car-