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Quarante jours après a lieu la troisième assemblée qui n’est encore que préparatoire. Aux membres présents dans les précédentes assemblées viennent se joindre tous les cardinaux, membres de la congrégation des Rites.

Dans la quatrième et dernière assemblée, on fait connaître tous les votes. Cette assemblée, qui prend le nom d’assemblée générale, est présidée par le pape, qui écoute tous les avis, mais ne décide rien encore. Elle ordonne qu’on jeûne, qu’on prie, qu’on médite et qu’on entende encore une fois les témoins qui, comme les juges, prêtent serment à genoux, la main sur les Évangiles. Tous jurent de garder un secret inviolable sur tout ce qu’ils verront et entendront, sous peine d’excommunication majeure.

« Que ne puis-je, — dit l’auteur du Discours théologique sur la canonisation des saints, — mettre sous vos yeux le zèle des témoins dont les procès-verbaux rapportent les dépositions ! On en voit qui font à leurs frais et entreprennent souvent de longs voyages à pied, pour les venir faire. Il s’en trouve qui ne les font qu’à genoux et les yeux baignés de larmes. Plusieurs ne peuvent trouver des expressions : les jours entiers, les volumes d’écritures ne suffisent ni à leur détail ni à leurs transports. »

L’héroicité des vertus une fois établie, on passe aux miracles.

Il faut que Dieu ait fait au moins deux miracles par l’intercession du sujet proposé, pour que ce dernier soit admis à la qualité de bienheureux. Si le candidat est mort depuis très longtemps et qu’il n’y ait, pour attester ses miracles, que des témoins auriculaires tenant de témoins oculaires les faits surnaturels exigibles, il faut alors au moins trois miracles. Si les témoins ne tiennent que de la tradition les prodiges qui font les bienheureux, il faut au moins quatre miracles. Pour être saint, il faut s’appuyer sur un plus grand nombre de miracles, d’une qualité supérieure, car les miracles sont classés par rang de mérite. Ainsi, l’on ne compte pour rien certains petits miracles qui sont comme la menue monnaie des prodiges célestes, et que les théologiens nomment pittoresquement fumée de sainteté, sanctitatis fumus.


« On ne devinerait jamais, » dit, dans un style familier et plein de grâce, l’abbé Mavillier, « on ne devinerait jamais la prudence et la sévérité que la cour de Rome apporte dans la discussion des miracles. »


Je n’ai, pour ma part, cherché à rien deviner, et j’ai voulu tout apprendre des écrivains autorisés. Ces écrivains m’ont fait savoir que tout se passait, pour la réception des miracles, à peu près comme pour celles des vertus héroïques. C’est surtout à la congrégation des Rites, composée de vingt cardinaux, de six prélats assesseurs et de trente consulteurs, que revient le soin de décider sur cette difficile matière des faits surnaturels.