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et, dans ce cas, la blancheur de leur surface, causée par la décomposition commencée du feldspath qu’ils renferment, les fait ressembler à de la pierre calcaire. Ils paraissent aussi souvent d’une couleur enfumée ou noirâtre et mollirent à fleur d’eau une barre ferrugineuse rouge. À partir de Tadoussac, et en remontant la rivière, sur une longueur de trente milles, ces rochers, tous escarpés et d’une grande élévation, présentent invariablement la même forme mammaire, les mêmes sommets arrondis. Dans le creux de ces rochers désolés on remarque quelques pins et sapins très courts, des groseilliers sauvages, des bleuets et une sorte de genièvre que les botanistes appellent savamment Juniperus sabina.

Le premier de ces rochers qui frappe particulièrement le regard, dès qu’on a dépassé d’environ trois milles l’embouchure du Saguenay, c’est celui qu’on appelle « La Boule, » nom qui lui a été donné à cause de sa forme arrondie. Assis sur une base gigantesque et formant une espèce de cap à l’extrémité d’une succession de rochers qui atteignent jusqu’à quinze cents pieds de hauteur, il s’avance considérablement dans la rivière, en rétrécit le cours et y occasionne par suite, au reflux des eaux, un fort courant et un remous contre lequel les petites embarcations luttent difficilement ; mais, en revanche, il offre un bon refuge aux bâtiments qui cherchent à s’abriter contre le vent de nord-ouest. La marée y atteint une hauteur de dix-huit pieds.