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plus grands que la terre, s’agitent et tournent comme des grains de sable sans jamais se rencontrer. Et cependant l’homme, infiniment petit, sonde ces profondeurs infiniment grandes. Quoi ! il les tient rassemblées dans un verre de lunette qui n’a pas même un pied de diamètre ! À quatre-vingts millions de lieues du soleil, il en analyse l’atmosphère, et il a pu calculer des distances telles que la lumière d’étoiles, placées au terme de ces distances, mettrait cinq millions d’années à nous parvenir, en faisant 78,000 lieues par seconde. Et cela n’est rien.

Où donc est quelque chose ? Là, dans cet insaisissable qu’on appelle l’esprit et qui se rend compte. Exister sans se rendre compte, c’est comme le néant. Voilà pourquoi la pensée est divine ; voilà pourquoi l’intelligence est le souffle même de Dieu.

Mais quelles horribles profanations l’homme ne fait-il pas sans cesse de cet attribut divin ? Il n’y a pas une chose, quoi ! il n’y a pas un seul aspect des choses qu’il ne défigure, qu’il ne rende méconnaissable, auquel il ne prête, pour le dénaturer, toutes les violences qui s’agitent en lui-même, tandis qu’il serait si facile, en ne troublant pas la vérité qui fait l’harmonie universelle, de conserver l’union et la paix qui assurent le bonheur !