Page:Bulletin de la Société d'études des Hautes-Alpes, 50e année , 5e série, 1931.djvu/547

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l’étendue de la rive (or l’île était inhabitée) des sanglots éclatèrent au loin, des gémissements, des exclamations qui se prolongeaient pitoyables : « mort ! Le Grand Pan est mort ! »


Je me souvins de cette légende, et il me vint une étrange pensée : « Et si je poussais le même cri ? »

Mais, entouré que j’étais de ce spectacle de joie, je ne pouvais penser à la mort, et de toutes mes forces je criai : « Il est ressuscité ! Le Grand Pan est ressuscité ! »

Et sur le champ, ô merveille ! en réponse au cri de mon cœur, sur tout le pourtour du vaste amphithéâtre, à l’unisson, roula un seul rire, montèrent des rumeurs joyeuses et des applaudissements. Un tumulte de jeunes voix se leva : « Il est ressuscité, Pan est ressuscité ! »

Devant moi, là-bas, au loin, soudain tout se prit à rire, d’un rire plus éclatant que, là-haut, le soleil, plus folàtre que le gazouillis des ruisseaux sous l’herbe. On entendit la cadence de pas légers et précipités qui se hâtaient. À travers les halliers verdoyants, apparut un instant la blancheur marmoréenne de tuniques flottantes et le chaud carmin de chairs nues. C’étaient les nymphes, les nymphes et les dryades, et les bacchantes, qui, des hauteurs, descendaient dans la plaine. Aux lisières de tous les bois, elles apparurent ensemble.

Les boucles ondulent sur leurs têtes divines ; leurs bras harmonieux élèvent des couronnes et des cymbales *, et des éclats de rire, rire olympien, courent et roulent avec elles.

Les précédant toutes, s’avance la déesse. De toutes la plus grande, la plus belle, le carquois aux épaules, l’arc à la main, sur sa haute coiffure, le croissant argenté de la lune…

Diane, c’est toi ?

Mais soudain la déesse s’arrêta… et toutes les nymphes avec elles. Leur rire sonore se tut. Je vis le visage subitement figé de la déesse se couvrir d’une pâleur mortelle, je vis ses jambes se pétrifier et, sous l’effet d’une terreur inexprimable, s’ouvrir sa bouche, s’agrandir ses