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frère que dans le rôle de Zénobie, de la tragédie de Cré- billon, et dans celui de Gertrude, d'Hamlet, notamment dans la scène de l'urne, où elle sut, pour une fois, modérer sa gesticulation outrée. Par contre, M€ Bourgoin enchante notre homme : belle attitude, belle plastique du geste et de la démarche, jolie figure, voix agréable, toutes les qua- lités d’une actrice : “ J'avais lieu de croire qu'elle surpasse- rait un jour Duchesnois ». Dans Andromaque, elle était aussi belle, douce et gracieuse que sa camarade demeurait vulgaire dans Hermione ; néanmoins, Jelgerhuis revient de cette opinion trop favorable après Hamlet : « Mie Bour- goin, écrit-il alors, restera toujours Mile Bourgoin ; elle ne fera pas de progrès ».

Damas n'est pas traité avec plus d'indulgence. La nature avait été marâtre pour lui : il avait le nez gros et épais, des yeux sans expression, des gestes pauvres, des mouvements lourds et sans noblesse, l'air d'un robuste paysan hollan- dais. Il parlait mal et était mal vêtu, bien qu'il comprit bien son rôle ; il n'était pas mauvais dans Pylade ; dans Gaston et Bayard, il faisait bien ressortir les passages bril- lants du rôle de Gaston, surtout au deuxième acte, lorsqu'il provoquait Bayard en duel, après une querelle au sujet d'Euphémie. Il lui arrivait néanmoins de commettre des contresens : lorsque Phèdre lui enlevait son épée, il était beaucoup trop ému : il aurait dû rester froid ;: Phèdre le dit elle-même dans l'acte suivant.

Talma fut regardé d’un œil aussi critique. Son physique restait assez loin de la perfection : le nez était trop court, les yeux pas assez grands ; il posait les pieds comme un campagnard, il secouait simultanément les deux mains et parfois le corps entier, “ comme un chien mouillé ». Cepen- dant il était bien proportionné, ni trop grand, ni trop petit, ni trop mince, ni trop gros ; sa voix était douce. Et puis,