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II faut avouer que, sur l’un et l’autre point, le travail de Mme H. ne porte à juger favorablement ni les architectes du théâtre de Strasbourg, ni leur architecture. Rivalités de personnes, de services, de coteries peut-être, dégénérant parfois en aigres querelles; projets mal étudiés, devis bâclés, avec, pour conséquences, des dépassements de crédits fantastiques, d’où récriminations, instabilité du personnel dirigeant, retouches hâtives, et médiocrement efficaces, des plans primitifs, tout cela ne contribuait guère à faire naître une œuvre d’art. Mais. dans toute cette affaire, s’est-il rencontré un seul véritable artiste ?

On en pourrait douter. Ce qui frappe dans cet exposé rigoureusement impartial, c’est la place vraiment excessive que tiennent les préoccupations purement décoratives, et portant sur quelles minuties! On se chamaille pour des palmettes, on argote sur des modillons; on ne songe qu’à l’aspect extérieur, comme si l’édifice n’avait pas plus de réalité que les portants et les toiles de fond. Quant aux soucis de commodité, de bonne circulation, de bonne acoustique, ils paraissent à peu près étrangers aux auteurs de tous les projets; plusieurs en sont visiblement restés à d’es formules dépassées depuis un demisiècle aucun n’a vraiment compris l’enseignement de Blondel. ne s’en est assimilé l’esprit. Mme H., qui nous a donné naguère une belle étude sur Ledoux, a dû trouver, en regardant les plans des architectes strasbourgeois, que le constructeur du théâtre de Besançon était un gaillard d’une autre envergure. S’ensuit-il que Mme H. ait fait trop d’honneur aux architectes d’un édifice médiocre ? Bien au contraire. Des travaux comme le sien nous montrent, avec rigueur, ce qui, des conceptions originales des maîtres, passe dans la pratique courante fort peu de chose à la vérité. Qu’en 1777, plus de trente ans après Soufflot, onze ans après les projets de Blondel, Boudhors propose encore une salle démesurément profonde, comme celle de la vieille Comédie Française (déjà condamnée en principe), voilà qui en dit long sur la lenteur des progrès en matière d’architecture théâtrale. Cela méritait d’être m’jntré avec précision et compétence; celà mériterait d’être fait de même pout d’autres villes; puisse l’excellent article de Mme H. lui susciter des émules,