Page:Bulletin de la société géologique de France - 1re série - 4 - 1833-1834.djvu/181

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« Retzius, dans sa lettre du 30 avril 1780, ainsi que Bergman dans ses Opuscules physico-chimiques de 1779, ont démontré que la magnésie est une terre particulière, quoique fort analogue à la chaux. Leurs argumens sont de toute évidence. Je me garderai donc bien de nier que cette terre, dans l’état où on l’a trouvée sur notre globe, ne soit une espèce particulière ; mais ce qui reste à discuter, et ce que je ne saurais me persuader, c’est d’abord que ce soit une terre primitive, une terre qui ait été toujours dans cet état, et ensuite qu’il n’y ait pas dans la nature de force capable de modifier une substance et de lui donner une autre forme.

Je crois, comme le célèbre Baumé (voy. p. 46), que cette magnésie n’est qu’une terre calcaire réduite à cet état par suite, d’une altération naturelle, et je me fonde à cet égard sur des phénomènes que j’ai observés dans les lieux où existent les marbres et d’autres roches, et où ces dernières ont participé à ces altérations. J’ai toujours trouvé cette terre dans les matières d’apparence volcanique, ou mêlée bizarrement avec elles. En parlant des marbres (ou roches altérées) semblables d’Ena et d’autres masses de même nature, autant que s’étendent mes observations, je ne les ai trouvés qu’entre de grandes déchirures des couches calcaires de nos montagnes. Ces déchiremens montrent que ces masses s’enfoncent profondément et verticalement on dans une direction peu éloignée de la verticale, et qu’elles ont été produites anciennement par une force ignée souterraine.

Les matières qui remplissent ainsi dans nos Alpes des crevasses quelquefois très étendues et très souvent larges, ont les caractères d’avoir souffert une action du feu (bruciamento) ou une fusion, et dans quelques lieux ce marbre est mêlé confusément en morceaux de diverses grosseurs, et traversé de veines, de manière qu’il en résulte des brèches.

En méditant sur l’origine probable de ces roches, je n’ai su imaginer autre chose, si ce n’est qu’elles étaient dérivées de ces mêmes calcaires dont les fentes les encaissent ; les roches calcaires auront été brisées et broyées par le feu volcanique, elles auront été calcinées, et leur couleur foncée aura fait place au blanc le plus éclatant ; enfin, elles auront été mêlées bizarrement avec d’autres matières brûlées (bruciate) et pénétrées par les eaux, repétries (rimpietrite) elles auront pris cette nouvelle forme en passant de l’état de calcaire commun et rougeâtre à celui de marbre.

Je me figure que cela s’explique par mon idée que la magnésie n’est que la chaux douée de propriétés particulières par suite de faction souterraine pyrogène. Je le crois d’autant plus que les